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Voix de Cornu

Retranscription de l'intégralité de la rencontre avec Paul Lerouge

13 Mars 2014 , Rédigé par Élèves du lycée Cornu

Interview de Monsieur Paul Lerouge,

Lycée Paul Cornu de Lisieux le 09 janvier 2014

Classe de 3ème Prépa Pro irardro - S.A – S. Girard

Quelles actions étaient menées par les résistants et contre qui ? Quel était leur but ?

Les premières actions, si vous voulez, c’est que l’on commençait par couper les lignes électriques… de téléphone, évidemment ou d’abattre ou de tourner les plaques, de façon que si c’étaient des plaques allemandes qui indiquaient tel campement, on les tournait à l’envers, donc les Allemands tournaient en rond. Couper les fils électriques, …. téléphoniques, je veux dire. Mais, malheureusement, ça n’a pas duré tellement de temps, car il y en a qui se sont faits prendre. Et je peux vous dire que les premiers fusillés … par les Allemands, ce sont les gars qu’ils trouvaient, qui coupaient les fils de téléphone. Les Allemands voulaient faire voir aux Français qu’ils étaient là, qu’ils étaient les maîtres… et qu’il ne fallait pas faire de choses comme ça.

Alors, après, on se renseignait sur les campements. Je peux vous une chose, moi j’ai eu plusieurs fois des coups de pied dans le derrière ou des coups de trique, car mon père m’envoyait voir combien il y avait de chars ou de matériels dans les campements allemands quand ils se déplaçaient. Bon, si j’avais affaire à un Allemand qui était compréhensif « raus, raus » et puis du vent. Mais j’avais des fois affaire à des Allemands qui me sortaient à coup de pied dans le derrière, parce que…, ou à coup de trique, parce que, nous, enfants, car je peux dire une chose, moi j’ai commencé à 12 ans et 10 mois, et on passait plus facilement. Un adulte, il était tout de suite arrêté. Mais les enfants, ils se chargeaient tout simplement de leur botter les fesses. Voilà. Après les actions, les actions de la résistance, c’étaient de repérer les dépôts allemands de matériels pour essayer de les faire sauter, de repérer par, euh…, comment déjà, rail, en ce qui concerne le grand réseau de SNCF de résistance, les trains de mission allemands ou les trains de matériels allemands comme il y en a eu sous un […] sauté sur la ligne entre Lisieux et Caen. Il y en a qui ont sauté. Et la façon de, à un emplacement donné, de faire sauter le train afin de détruire… Il y a eu une fois à …, je ne me rappelle plus le patelin, il y a eu 80 Allemands de tués. C’est un train de permissionnaires. C’est des choses comme ça, de détruire l’armée allemande ou de tuer des soldats indirectement. Alors, je ne vous dis pas que des fois, quand il y avait des choses qui se passaient comme ça, les Allemands se vengeaient. Ils fusillaient. En premier, ils fusillaient des communistes, car ils étaient vraiment anti-communistes et tous les communistes qui étaient dans les prisons, comme à Caen ou autre, ça s’ils étaient dedans, ils étaient fusillés. Pas d’histoire. Et puis après, s’ils n’avaient pas assez de communistes, ils prenaient un autre. Car tuer un soldat allemand, c’étaient 10 fusillés, 10 civils fusillés. Tuer un officier allemand, c’étaient 50 civils, 50. Vous voyez un petit peu. Alors, ils prenaient comme ça n’importe où. S’il n’y avait pas assez de monde en prison, ils pouvaient très bien vous arrêter en ville, et puis… vous étiez fusillés ou déportés. Vous aviez le choix, euh… enfin c’était pas le choix, c’était eux qui avait le choix de vous fusiller ou de vous déporter. Alors dans les camps d’Allemagne, on sait exactement comment s’était dans les camps d’Allemagne.

Quelles étaient les représailles que subissaient les résistants arrêtés ? Comment arriviez-vous à vous cacher sans éveiller les soupçons ?

Comment on faisait pour se cacher ? se cacher ? Ceux qui n’étaient pas connus, ils n’avaient pas besoin de se cacher, mais ceux qui étaient plus ou moins connus, ils étaient cachés, si vous voulez. Nous, on a caché à Beaumesnil, un chef-lieu de canton de 500 habitants, peut-être un peu plus maintenant, où il y avait un très grand réseau de résistance, et nous avions plus de 100 résistants réfractaires à cacher, on allait jusqu’à 50 kilomètres à la ronde pour les cacher. On les cachait chez des fermiers que nous connaissions bien et, ou des artisans ou d’autres personnes par connaissance comme ça. Car le réfractaire, ça devenait un réfractaire celui qui était caché, eh bien, il n’avait droit à rien du tout : pas de cartes d’alimentation, pas de tabac, rien, rien. Il fallait se débrouiller, car nous avions dans notre réseau, … on plantait du tabac, on demandait aux cultivateurs 50 kilos de grain, qu’il moulait pour faire du pain, pour nourrir les réfractaires. Car les réfractaires… on n’aimait mieux, si vous voulez, sauver un aviateur américain, anglais ou autre, qu’un réfractaire, car un réfractaire c’est dangereux. Vous aviez des jeunes gens qui s’avaient se contenir, et d’autres non. Nous avons une histoire terrible qui nous a coûté 84 arrestations, dont 40 ne sont jamais revenus des camps, et par une erreur de deux réfractaires. Vous avez des réseaux qui ont été anéantis, comme celui de Barneville-sur-Seine, complètement anéanti par les erreurs d’un seul réfractaire, qui étant las de tourner en rond sans rien faire, est sorti en ville, a bu un petit coup, et au deuxième coup, comme dit l’autre « un verre, ça va, deux verres bonjour les dégâts », et bien ça a été bonjour les dégâts, il a été entendu par des mauvaises oreilles, puis les Allemands ont ceinturé tout le…, ils ont tués les…les… les garçons qui étaient cachés. Non… ça c’est des époques assez difficiles parce qu’il y a eu tellement de faits bizarres, vous savez. Les Allemands ne faisaient pas de sentiments, pas du tout. Il y avait un maquis qui était très important, qui n’est pas loin d’ici, Saint-Etienne-l’Allier. Saint-Etienne-l’Allier, ce n’est pas loin d’ici, ce petit patelin, vous aviez Robert Leblanc, le fameux Marquis Surcouf, il y avait je ne sais pas combien de résistants, dont beaucoup ont perdu la vie. Robert Leblanc s’en est bien tiré car c’est un homme exceptionnel, Robert Leblanc, un véritable commandant, quelqu’un qui savait commander, vous savez. Mais vous pouviez avoir des jeunes gens qui étaient las de tourner en rond et qui commettaient des erreurs. Parce que pour nous, voyez-vous, c’est que tous ces jeunes-là n’avaient droit à rien, car pendant la guerre nous avions les cartes d’alimentation, que ce soit du pain, de la viande, du chocolat, c’était une fois par an et encore c’était des chocolats fourrés parce qu’il n’y avait qu’autour où il y avait du chocolat, et le tabac. Et le réfractaire qu’est-ce qu’il fait ? Il tourne en rond. Il est dans la ferme mais il n’a pas d’argent. Le cultivateur ne le payait pas. Il était nourri, logé et blanchi. Et c’est tout. Mais le tabac, pour passer le temps, il fallait fumer, beaucoup de jeunes fumaient. Alors, nous avions dans le réseau un Belge, Monsieur [Bosquère], qui plantait du tabac dans les champs, car le maïs, si vous voulez, ça n’existait pas le maïs, pendant la guerre on ne savait pas ce que c’était, le maïs est apparu après, pendant la guerre, c’était le tournesol, car autrefois c’était la betterave fourragère que l’on faisait, et que l’on mélangeait à la demi-paille, de l’écorce de blé, pour donner aux bestiaux. C’était la betterave, ça […], il n’y a plus que la betterave à sucre aujourd’hui et puis c’est tout. Eh bien dans ce champ de tournesol, dans le milieu, il plantait un millier ou même plus de tabac. Et il plantait du tabac de Virginie, car il connaissait ce Belge, le tabac de Virginie est un tabac à grosse feuille mais un tabac bas, alors les Allemands passaient en voiture, ils ne le voyaient jamais. Ça se récolte avant le tournesol. Le tournesol a une récolte plus tardive. Et je m’en rappelle, car on faisait l’entretien des toitures de cette ferme, je suis sûr que si j’allais encore dans les bâtiments, toutes les pièces de bois avaient des clous partout. C’étaient les feuilles de tabac qui étaient pendues partout. C’étaient des champs de feuilles de tabac. Et ce Belge, eh bien une chance, avait une petite machine… à main… pour couper le tabac. C’était sa femme qui tournait la manivelle, c’était Mr Bosquère qui enfilait les feuilles de tabac. Et c’est moi, après qui enlevait, parce que comme papier, il n’y en avait pas. C’était les journaux, on n’avait des journaux. Alors c’était précieux, la moindre chose, le moindre tissu était précieux. Un petit carré de papier, hop on fermait le bout de tabac. Et je partais avec ma musette. J’étais distributeur de tabac, gratuitement, mais je distribuais le tabac pour que les gars s’occupent. Parce qu’on y arrivait que comme ça, car, comme je vous disais il y en avait qui arrivait dans des artisans, mais c’était déjà plus […]. Nous avions, dans l’entreprise à mon père, nous en avions quatre. Il y avait des gens qui arrivaient, qui ne pouvaient plus tourner. On avait un « Tour d’Europe » charpentier, ce qui était très rare, très rare, on avait deux « Tour de France », que l’on appelle des gars « trimards », un couvreur et un charpentier, et nous avions, tout arrive un fabricant de billard. Mon père, je ne sais pas s’il y a cru, il venait faire de la menuiserie, car on ne trouvait rien. Je vais vous expliquer un cas : nous n’avions même pas de brouette. Pour les brouettes en caoutchouc ça n’existait pas ; pour les brouettes en bois, mais c’est usé. Alors un jour, les gens du pays « le père Lerouge, vous ne pourriez pas nous faire faire fabriquer des brouettes ? ». Alors mon père dit, puisque c’est ça oui. Alors le charron a fait les roues de brouettes, et mon père a fait faire à son charpentier douze brouettes d’un seul coup... pour donner aux gens. Non mais c’est idiot, mais on manquait de tout Y’avait rien, y’avait rien. Il n’y avait pas de voitures, pas de vélos. Les vélos, on avait quelques vélos. Mais les vélos, il fallait avoir un bon pour avoir un pneu. Tout était avec un bon. Mais on en avait rarement. On fabriquait nos pneus nous-mêmes avec des vieux pneus de voiture. Des pneus plats. La chaîne… on montait toujours les côtes à pied. Une chaîne, c’était précieux une chaîne de vélo. Il ne fallait pas qu’elle casse parce que comment on allait la réparer. On a passé les quatre ans d’occupation comme ça, les quatre ans et demi d’occupation comme ça toujours… la peur aux fesses. Moi étant jeune quand on faisait une mission, j’étais très fier, mais je peux vous dire une chose on avait la peur aux fesses. Une fois je me rappelle, j’avais dans ma voiture postes émetteurs, armes et autres papiers et je n’ai pas été arrêté… j’ai été aidé par un jeune réfractaire que je devais déplacer, la première fois que je le voyais, et j’ai aperçu de loin, parce que on regardait quand même… la Feldgendarmerie, la Feldgendarmerie c’étaient des Allemands en motocyclette [avec une pancarte] et ils avaient cette fameuse pancarte, ce fameux croissant de lune. De loin, oh !, j’ai aperçu le croissant, j’ai dit au gars « pfftss, fiche le camp ». Il m’a dit « pourquoi ? ». Je lui ai dit « fiche moi le camp, prends par les portillons ». Il est passé devant les gens qui habitaient là, les gens n’ont rien compris d’ailleurs, ils n’ont jamais su qui s’était. Et je suis passé devant les Allemands, on ne pouvait pas faire marche arrière. Je savais qui, qu’est-ce que j’avais. Alors en passant devant les Allemands, j’ai fait « Messieurs bonjour ». Eh bien je vais vous dire une chose, ils m’ont répondu. Ils m’ont souri et m’ont salué. J’étais bien content quand j’ai passé hein. Dans des trucs comme ça il fallait…, il fallait y aller au culot. On avait une chance quand même, nous enfants, c’est pour ça qu’ils ont confié aux enfants, et que les Allemands ne s’en sont jamais aperçus. Il y a des missions, car il y a eu des missions qui ont été confiés à des jeunes enfants, des sabotages incroyables qui ont été faits par des garçons de 14, 15 ans. Des jeunes filles, vous savez, il y a eu beaucoup de jeunes filles, des fillettes de 12, 13 ans qui ont été dans les…, des messagères étaient beaucoup. Leblanc avait sa petite servante, elle avait 13 ans. C’est elle qui portait tous les plis. Et il y avait le fameux maquis Césario à Tulle, maquis…, à Loches, à Loches celui-là, eh bien, la porteuse de message était une petite fille de 13 ans dont le père était le maquis de Loches, le fameux maquis Césario. Il y a eu beaucoup de faits comme ça, je ne me rappelle plus, des sabotages faits par les enfants ce que ne pouvait pas faire… Un jour, un fait. Deux enfants de 14 ans, deux garçons qui avaient une écluse à faire sauter et la résistance ne pouvait pas le faire car cette écluse était gardée par deux soldats allemands. Comment faire ? Eh bien c’est deux enfants de 14 ans qui ont fait sauter l’écluse. Voilà comment ils s’y sont pris. Ils étaient en vélo, il y avait le panier et dedans il y avait la dynamite. Eh bien quand ils sont arrivés, ils se battaient. Factice. Des coups de poing ou autres, n’importe quoi, ils se battaient. Au point que les Allemands, ça les a fait rire. Ils ne se sont pas méfiés. Ils sont passés devant les Allemands, ils ont franchi les écluses. Ils sont passés comme ça. Quand ils étaient sur l’écluse ils se battaient, puis quand ils sont arrivés dans le milieu de l’écluse, ils se battaient encore un peu plus. Alors les Allemands riaient tellement qu’il y en un qui s’est couché parce qu’il était tabassé par l’autre. Mais pendant qu’il était tabassé sans lui faire mal, eh bien, il posait sa dynamite. Les deux garçons sont repartis en se battant, et quand ils n’ont plus été vus par les Allemands, ils sont montés sur le vélo et, je peux vous dire, ils n’ont pas demandé leur reste. Mais après c’était le « Boom ». Eh bien je peux vous dire une chose, c’est que les deux Allemands qui gardaient l’écluse, je n’aurais pas voulu être à leur place après. Parce que, comme dirait l’autre, ils ont dû être passé à tabac d’avoir fait sauté … parce que cette écluse-là, les Allemands en avait besoin. Et ce sont deux garçons de 14 ans qui ont fait ça. Mais il y a eu beaucoup de faits comme ça, énormément, par les enfants. Je le sais parce que je reçois beaucoup de revues de résistance et même autres, car je fais partie de beaucoup d’associations, eh bien, les faits qui ont été faits par des enfants, c’est incroyable, incroyable. Car les Allemands ne se sont jamais méfiés. On arrivait à passer. Où un adulte ne passait pas, un enfant, il fallait bien lui expliquer les risques qu’il prenait et on passait. Je vous dis, des coups de pompe dans le derrière et des coups de trique, j’en ai ramassé plus d’une fois, mais je savais que c’était pour la bonne cause. Alors je n’étais pas à un coup de pied dans le derrière près !

Comment arriviez-vous à vous ravitailler, notamment en armes, pour commettre des exactions contre les Allemands ?

Alors là, les armes. Il y avait d’abord les Anglais. Il y avait les parachutages par conteneur, donc il y avait un peu de distribution. Il y avait des réseaux qui étaient plus ou moins gâtés. Et il y avait aussi des armes qui dataient de 1940, que certaines personnes avaient gardé et quand on arrivait à le savoir qu’ils ne voulaient pas les garder et qui les donnaient au réseau. Nous, on a eu pas mal d’armes comme ça, surtout des mitraillettes et aussi des armes qu’on volait aux Allemands. Voilà ! On les volait. Alors ils les cherchaient mais… comme dirait l’autre, c’est comme une aiguille dans une botte de foin… Ils ne les trouvaient pas. On avait des armes comme ça. Les postes émetteurs, nous, on en avait deux. Et ça, c’étaient deux postes émetteurs, à vous dire franchement en tant qu’enfant, je ne sais su tellement d’où ils provenaient. Je ne sais pas. Je peux juste vous dire une chose : c’était grand comme ça à peu près, comme un gros carton de chaussures.

Comment arriviez-vous à communiquer avec les autres groupes de résistants sans éveiller les soupçons ?

La communication entre réseaux de résistance n’était que par les chefs. Nous, non. Moi je ne connaissais pas. Mon voisin pouvait faire partie de la résistance et faire partie d’un autre réseau. Il est arrivé que dans des familles où la femme faisait partie d’un réseau et que l’homme faisait partie d’un autre réseau. Et c’était à la Libération qu’ils ont su tous les deux qu’ils étaient résistants. Sinon ils ne le savaient pas. C’est arrivé ça. Alors il n’y a que par les chefs, en haut lieu. Et après, bon ben, vous savez. Mais autrement, les membres du réseau de résistance ne se connaissaient pas. Mon père, il ne connaissait que Monsieur Trumelet et le colonel Antoine. C’est tout. Mais autrement, il ne connaissait que quelques personnes comme ça, mais on évitait… parce qu’il y avait, vous savez, toujours une méfiance. Même dans les pays il y avait une méfiance parce qu’on ne savait pas à qui. On n’avait toujours peur des bavards. Car un bavard, vous savez après, … on avait toujours peur que ça arrive, car on a vu tout ça. Les gens qui étaient bavards, et malheureusement, ce n’était pas beau à la fin, je peux vous le dire. Non il y avait une certaine méfiance, je vous le dis, il n’y a qu’en haut lieu.

Quel était le rôle des résistants lors des grandes phases de la guerre comme le débarquement de Normandie en juin 1944 ?

Lors du débarquement, je vais vous expliquer, il y a beaucoup de résistants… qui se sont révélés plus ou moins. Mais il y a des résistants qui ont fait beaucoup d’erreurs. Car ils ont cru que les gens débarqués, dès le lendemain il n’y aurait plus d’Allemands. Il y a eu beaucoup de réseaux qui ont été anéantis. Mais il fallait se méfier. Vous aviez des gens qui étaient sages, comme l’était mon père, parce que nous avions une chance quand même. Le capitaine Georges [Clounet ???] était un capitaine qui avait fait toute la guerre en tant qu’officier de 1914 dans l’artillerie. Donc il avait une formation. Et moi quand j’ai été pris là-dedans, il m’a dit « mon petit gars… », comme ça d’abord on a changé mon nom, je ne m’appelais plus Paul, on m’appelait le « Petit Pierre », « … fais attention, fais attention, tu écoutes, tu regardes, mais tu te tais, tu ne dis rien, tu ne parles jamais. Si tu as quelque chose à dire, tu le diras à ton père seulement ». Mais même pas à lui je disais, je ne disais qu’à mon père. Il y avait des gens qui, si vous voulez, qui s’étaient bien structurés, et d’autres à la Libération, ben pfff… quand vous avez ce pauvre gars qui s’est fait fusillé à Meulles, le frère de Monsieur Rousseau. Vous avez un monument à Meulles, tout près de la mairie, qui est donc le lieutenant Rousseau. Eh bien le 6 juin ou autre, on sort, on commence à sortir la vieille pétoire ou autre, et vous avez les Allemands qui arrivent, parce que ça voyageait, vous savez. D’où, à partir du 6 juin, c’était le remue-ménage dans l’armée allemande, hein. D’où le 6 juin, le 8 juin, ils sont arrivés à Beaumesnil, toute une délégation d’Allemands, l’artillerie, ils ont réquisitionné le château car nous avons eu le deuxième hôpital militaire allemand. C’était à Beaumesnil qu’il était. Nous avions le dépôt pharmaceutique, et nous avions le génie, et nous avions, en prime, le dépôt de munitions. Alors je vous raconterais une histoire si nous avons le temps. Incroyable. Et automatiquement, les Allemands sont arrivés. Il y a un sous-officier qui est venu voir mon père « Monsieur, nous venons vous demandez de peindre des croix rouges sur le château ». S’il y en a qui ont vu ces fameuses croix rouges sur le château de Beaumesnil, c’est mon père qui les a peintes. Et mon père a dit non, le résistant qui travaillait pour les Allemands, ça s’était rarement vu ! Oui, mais seulement une heure après le sous-officier allemand est revenu, mais avec deux soldats en armes. « Monsieur Lerouge, nous venons, vous et vos employés, vous réquisitionner pour peindre les croix rouges ». Pendant deux jours, mon père… , ils lui ont fourni la peinture. Eh bien, je peux vous dire, que la peinture était bonne parce que 50 ans après la peinture ça se voyait encore. Ils ont peint tout le toit en croix rouges. Vous aviez vu peut-être monsieur ! Vous voyez. Eh bien, c’était en quelle année ça. C’est le père Lerouge qui était là-bas avec ses gars qui étaient en train de … et il m’a dit « à des moments, on était obligés de […] les avions qui piquaient… les avions anglais ou américains, ils étaient obligés de se mettre derrière les pierres. Les Allemands, quand ils avaient besoin ils réquisitionnaient. Et puis après, on a vu beaucoup de morts. Moi j’en ai vu, j’ai vu beaucoup d’Allemands étalés dans les sous-sols. J’ai vu une fois, où j’étais resté comme ça, un officier allemand… eh bien, il y avait autant de trous dans le corps et les jambes que dans une passoire. Je ne sais pas qui l’avait mitraillé ou quoi, mais il était littéralement pulvérisé. Eh bien les Allemands étaient partis, ils l’avaient laissé là dans le sous-sol. Ce sont les réfractaires qui l’ont enterré, parce qu’ils avaient fait un cimetière à côté du château de Beaumesnil, parce que tous les Allemands qui mourraient des suites de blessures de guerre, étaient enterré ici. Et voilà juste après la guerre.

Rencontre avec Monsieur Paul Lerouge

jeudi 09 janvier 2014, lycée Paul Cornu

Classe de 3ème prépa pro A, accompagnée de Mme Carisio

Je vais me présenter, je suis Paul Lerouge, je suis lexovien, j'habite rue Henri Papin. Je vais vous demander quelque chose : savez-vous qui était Henri Papin ? (PAUSE) Henri Papin était un jeune résistant lexovien qui a été fusillé le 15 Août 1943, il avait vingt-trois ans. Donc il y a une rue qui porte son nom et j'ai l'honneur d'habiter dans cette rue-là. Voilà.

Alors maintenant, je vais vous expliquer comment je suis entré dans la résistance. Et bien, mon père qui était un grand résistant avait comme ami le capitaine Georges Trumelet. Ce monsieur Trumelet était capitaine, il a fait toute la guerre de 1914 en tant qu'officier. Il avait donc l'esprit de commandement et avec mon père, c'était un grand ami, il lui a dit qu'il fallait que l'on fasse quelque chose...parce que mon père, ça l'agaçait. Il ne pouvait rien faire.. Il détestait les allemands qui avaient occupé la France. Il n'avait pas été mobilisé, mon père, parce que nous étions quatre enfants et à la déclaration de guerre les pères de famille de quatre enfants n'étaient pas mobilisables. Comme les Allemands sont arrivés beaucoup plus vite qu'on ne le pensait, ils n'ont pas eu le temps de faire appel aux hommes qu'ils n'avaient pas mobilisés. Alors, fin 1941, ça commençait à se concrétiser, la résistance, il y avait déjà eu des réseaux comme la F.T.P, comme la Confrérie de Notre-Dame, comme Valmy, tout ça. Il y a avait beaucoup de réseaux connus mais qui ont été dissous assez vite par les Allemands parce que bien souvent c'était des jeunes qui étaient là dedans et ils n'avaient pas été formés. Et les Allemands savaient s'y prendre.

Alors, j'ai fait connaissance avec un jeune officier, le colonel Antoine, René Antoine, qui devint une personne très importante dans la résistance. Et ils sont entrés dans la résistance en janvier 1942 au F.T.P (Francs Tireurs et Partisans). C'était un réseau assez porté à gauche (mais ça, les gens font ce qu'ils veulent), très actif. Le capitaine Georges Trumelet recevait des messages par télégramme car on évitait de téléphoner car les allemands avaient truffés des écoutes partout. Donc il avait trouvé la formule, c'était le télégramme. Mais le porteur de télégramme, quand il en avait déjà porté un ou deux, les allemands pouvaient le repérer. Le capitaine Trumelet a dit : « ça va pas aller ça ! C'est pas possible parce qu'ils vont se douter de quelquechose ! ». Alors il a demandé à mon père si son fils pouvait porter les télégrammes. Car je vais vous dire, quand le réseau s'est crée, il y avait une demoiselle, Mme Capet, elle était la receveuse des postes de Beaumesnil et c'est elle qui recevait tous les messages. Il y avait aussi Mlle Michaud qui était aussi une retraitée. Elle, elle planquait les réfractaires qui étaient de passage. Tout ce qui devait être caché, ça passait par elle avant d'alller chez mon père parce qu'il ne fallait pas savoir que mon père existait. Donc le capitaine Trumelet a demandé à mon père : «Est-ce que ton fils pourrait nous faire ça ? » et mon père a répondu « oui ». Et « est-ce que tu as confiance en ton fils ? », « Oh pour ça rien à craindre ! ». C'est comme ça qu'en janvier 1942, à 12 ans et 10 mois, je suis entré au réseau F.T.P. Le capitaine Trumelet m'a dit : « On va lui donner un nom. ». C'est comme ça que je suis devenu le Petit Pierre. Personne ne me connaissait sous le nom de Paul. Et quand il y avait quelque chose à faire, on disait : « on va envoyer le petit Pierre ». Après la guerre, des années après, mes courriers étaient toujours adressés au petit Pierre.. C'était rigolo. À chaque fois ça faisait rire d'ailleurs. Et je suis devenu jeune résistant à 12 ans et 10 mois, voilà !

Je portais les messages, il commençait à y avoir des réfractaires car c'est à ce moment là que le S.T.O requisitionnait les Français pour aller construire le mur de l'Atlantique avec la maison Todd qui avait une agence à Beaumont-le-Roger.

Au bout d'un moment, le capitaine Trumelet a dit que ça n'allait pas, que le réseau était trop politisé...mon père ne faisait pas de politique du tout. Et il venait de se créer un mouvement très important, en août 1942, par M. Destrées à Paris. Il y avait Destrées, Lartigue, Deroudère, la commandante Moulin (?). Des personnes que j'ai très bien connues à la libération. Lartigue, ça fait trois ans que je ne le vois plus. On est entré dans le réseau de la résistance. Pour moi, tout a changé car si j'ai continué mes missions, c'est qu'on m'a demandé après d'aller sur la route et de ramasser les gars. Car dans le temps, on allait souvent à vélo ou à pied. Alors on m'envoyait sur la route et on me disait : « alors, il va être habillé comme ça, il va avoir un chapeau, une casquette, un mot de passe, et il va te répondre ». Et je récupérais les gars comme ça que je conduisais chez Mlle Michaud. Pas chez mes parents. Et après on allait les cacher. Dans ce petit canton de Beaumesnil, qui fait quand même 17 communes, et bien, on a caché plus de 100 réfractaires, à quarante-cinq kilomètres à la ronde. Les réfractaires étaient des jeunes gens qui ne voulaient pas aller travailler en Allemagne. Ils recevaient leur convocation mais comme ils connaissaient des personnes appartenant au réseau, ils arrivaient à se cacher. C'est le réseau de Paris qui nous envoyait des réfractaires parisiens.

Entre parenthèse, je ne voulais pas faire le métier que j'ai fait, je voulais être pharmacien. Mais en 1940, malheureusement ma vie a changé et je me suis retrouvé dans le bâtiment. Je ne le regrette pas, c'était comme ça, c'était comme ça.

Et chez Mme Michaud, après je reconduisais les jeunes gens où il le fallait. Il y avait aussi de la correspondance avec Londres car nous avions une personne qui s'y connaissait très bien en poste émetteur, qui passait les messages. On commençait déjà à avoir des parachutistes qui tombaient, qui étaient abattus. Je peux vous dire que j 'en ai vu des avions tomber, des chasseurs et des bombardiers, j'en ai vu tomber. Il y en a même un qui a manqué de me tuer. J'ai vu une forteresse, une B17 éclater juste au dessus de ma tête. Deux aviateurs n'ont pas pu sauter mais les autres, je les ai vus sauter comme ça (geste). J'ai manqué aussi d'être tué une fois par une V1. On récupérait beaucoup de parachutistes. Il fallait les cacher, les transporter. On avait une personne qui avait été formée, qui allait à Paris, qui emmenait les parachutistes habillés avec des bleus, n'importe quoi parce qu'il fallait cacher leur habillement jusqu'à Paris. Et de Paris, il y avait un relais qui allait jusqu'à la frontière espagnole. Les Espagnols, c'était autre chose : si on avait affaire à des républicains, ils nous aidaient. Si on avait affaire à des franquistes, c'était autre chose. Ce qu'on voulait c'était passer par le Portugal parce que les Portugais n'auraient jamais vendu tandis que les Espagnols...Y'a des Français qui ont été arrêtés au fameux camp espagnol du « ROSA » et qui ont été internés pendant je ne sais pas combien de temps. Je reviens...Y'avait donc les postes émetteurs qu'il fallait déplacer mais ce n'était pas moi, enfant, qui m'occupait de cela. Moi, j'étais juste l'enfant qui faisait les transports, les papiers, les postes émetteurs, tout ça. On disait tu vas à telle place porter le poste émetteur. Et un jour, on m'a dit : « il va falloir que tu ailles rechercher le poste émetteur parce que les Allemands détectaient les postes émetteurs. Quand ils savaient qu'il y avait des postes émetteurs, ils faisaient déchausser leurs soldats , ils poussaient le véhicule pieds-nus. Comme ça, ils n'en ont jamais eu parce qu'il y avait toujours un surveillant. Nous, les antennes, en tant que couvreur, on connaissait la combine. On leur volait un fil de cuivre et derrière les gouttières, on crochait un fil de cuivre qui redescendait, donc les Allemands ne voyaient rien. C'étaient des astuces comme ça ! On les roulait presque toujours !

Intervention de Mme Léger : M. Lerouge, je vous arrête parce que les élèves ont des questions à vous poser.

1/ Jusqu'à quel âge vous êtes-vous engagé dans la résistance ?

Moi, j'ai commencé à douze ans et dix mois, en janvier 1942. Je suis resté jusqu'au 24 août 1944 , jour de la libération de Beaumesnil par les Anglais, l'armée anglaise. Et là, le 24 août 1944, mon père m'a dit « c'est fini pour toi, maintenant. Tu as risqué ta vie pendant deux ans et demi, on en parle plus ». Ça s'est terminé ce jour-là.

2/ En vouliez-vous aux Allemands ?

Pendant la guerre...oui ! C'était des ennemis. Après, c'était terminé.

Si j'en veux encore aux Allemands ? Je vais vous dire, j'ai un petit neveu qui est allemand. Et ce serait stupide car les petits-enfants n'ont pas à payer les erreurs des grands-parents. Ainsi que les collaborateurs français, ce n'est pas maintenant...moi, je connais beaucoup de choses sur les collaborateurs que je n'ai jamais dîtes parce que leurs petits-enfants auraient à en supporter les conséquences. Le mieux c'est de garder mon secret, c'est tout.

Non, le Allemands, c'est sûr, on leur en voulait aux Allemands pendant la guerre, c'était nos ennemis et il fallait par n'importe quel moyen leur faire du mal. Je vais vous dire une chose, je n'ai jamais tué un soldat allemand mais je ne dis pas que je n'en ai pas fait tuer par intermédiaire. Je vais vous raconter une histoire : Je suis celui qui a vu les deux derniers soldats allemands de Beaumesnil. C'était deux « SLOPPERS » (des Allemands qui avaient une moto, ume grosse BM avec un « TANTSAD ». Sur le « tantsad » était installée une grosse mitraillette lourde. Et c'est celui qui était sur le siège arrière qui était le mitrailleur. Ils s'arrêtaient dans des carrefours, se camoufflaient pour attendre l'armée anglaise et américaine qui allaient venir. Et quand les estafettes arrivaient, ils tiraient dessus pour tacher d'en tuer et aussi pour ralentir l'avance de l'armée anglaise qui repartait en arrière pour dire « attention, on a été tiré ici ». Ce qui permettait à l'armée allemande de se dégager beaucoup plus vite car il faut avouer que...Pendant deux jours et deux nuits, j'ai vu l'armée allemande marcher et des Allemands avec un cadre de vélo, chargé de mitraillettes. Le soldat, il n'avait même pas de pédales, rien du tout. Il était comme ça (accompagné de gestes) avec les pieds pour faire avancer le vélo. On était nous-même sidéré de voir ça, ça a été la débacle complète. Mais ils ont eu beaucoup de chance quand ils ont travaersé Beaumesnil et nous aussi. Il y a eu du brouillard pendant deux jours et il n'y a pas eu d'aviation. Les avions, dans le brouillard, ils ne pouvaient pas voler. Donc l'armée allemande en a profité. Ils passaient derrière la maison de mes parents parce qu'ils venaient de la poche de Falaise, passaient par la Barre en Ouche, traversaient Beaumesnil et prenaient la route de Beaumont-le-Roger pour gagner la Seine. Ils traversaient la Seine du côté de Barneville sur seine.

Et j'ai vu aussi les deux premiers Anglais, c'est vraiment un coup de chance. J'étais sur la place de la mairie parce que mon père m'envoyait toujours surveiller les alentours : « S'il y a le moindre mouvement, ceci-cela ! », il fallait que j'aille tout-de-suite lui dire. Et là, qu'est ce que j'entends, un bruit de chenillard. Je me dis « encore un char allemand qui est en retard !» et qu'est-ce que je vois arriver au bout de la place, un petit carrier. C'est un petit chenillard, le carrier, qui fait quatre mètres de long avec deux militaires dessus. Je regarde et dans moi-même, je me dis, il n'est pas gris-vert celui-là, il est kaki. Ce sont les Anglais, ça ! C'était en effet les deux premiers Anglais qui arrivaient dans Beaumesnil. Les deux estafettes que les Allemands auraient pu descendre. Ils m'ont demandé s'il y avait encore des Allemands et je leur ai expliqué, moi qui ne connaissais que deux ou trois mots, que c'était moi qui avais vu les deux derniers. Alors, ils ont fait demi-tour et sont repartis. Pour en revenir aux deux Allemands, ils m'ont demandé les deux Allemands, car j'avais appris pas mal l'allemand pendant la guerre, en quatre ans de temps, quand on est jeune, on apprend des phrases au contact avec l'armée. Et ils m'ont demandé par où était passée l'armée allemande. Je savais que l'armée allemande évacuait par Beaumont-le-Roger. Mais j'avais entendu dire que les Américains étaient arrivés à la Ferrière sur Isle alors moi, je me suis dit, je vais les envoyer chez les Américains parce que je savais très bien qu'entre Beaumesnil et Beaumont-le-Roger, il y avait beaucoup de bosquets et la forêt de Beaumont-le-Roger et que les Allemands pour évacuer cherchaient des routes avec des petits bois. Et sur la route de sept kilomètres entre Beaumesnil et la Ferrière sur Isle, il n'y avait que deux bosquets. Je me suis dit au moins s'il y a des chasseurs , ils vont pouvoir s 'amuser, les Allemands ne pouvaient pas se cacher. Après, je n'ai pas su s'ils s'étaient fait mitrailler et si c'était le cas, c'était comme ça, on ne cherchait pas toujours. On voyait tellement de chose qu'on ne pouvait pas tout analyser. Des histoires, il y en a qui me reviennent mais j'ai été tant d'années sans en parler. Et même mes propres enfants, je ne leur ai jamais parlé de la résistance et de ça d'ailleurs. Mon fils, le plus jeune, a appris des choses soixante ans après et a dit : « je ne savais pas que tu avais fait tout ça » et je ne suis pas d'un caractère à inventer. Je viens parce que je suis content d'être avec vous et de vous raconter mes histoires de la résistance. De temps en temps, ça me rajeunit un peu.

3/ Est-ce qu'il y avait des femmes dans la résistance ?

On avait inventé la parité, dans la résistance, bien avant tout le monde. Dans Beaumesnil, il y avait autant de femmes que d'hommes. Et dans tous les réseaux de résistance de France, j'ai un gros livre à la maison, il y a beaucoup de femmes. Après la guerre, j'ai conuu beaucoup de dames qui étaient dans la résistance. Il y en a une qui habite Notre-Dame-de-Courson qui était à « COMBAS » près de Lyon. Elle a la médaille de la résistance. Elle approche de quatre-vingt dix ans, c'était une jeune fille à l'époque. Et des jeunes filles j'en ai connues parce qu'il y a eu des rassemblements bien après la guerre en ce qui concerne les jeunes résistants. Ce rassemblement, c'était surtout les croix de guerre, la Centurie : ce sont les cent plus jeunes Croix de guerre de France. Moi, j'ai été longtemps numéro sept, puis j'ai été numéro cinq parce malheureusement, ils décèdent. Mon tour viendra aussi. Le plus jeune s'appelle Jean-Jacques Hauduc, il avait douze ans quand il est entré dans la résistance. C'était le fils de deux grands résistants qui n'ont pas eu de chance. Ils ont été arrêté tous les deux. Son père a été je ne sais pas combien de temps à Buchenwald et sa mère à Ravensbrück. Sa mère a été vendue par le S.S aux laboratoires Bayer, les laboratoires pharmaceutiques qui, pendant la guerre faisaient beaucoup d' essais sur les corps des prisonniers. Ce n'est pas une référence, je peux vous le dire. S'il va dans une pharmacie et qu'il a besoin de médicaments et qu'il voit Bayer, il dit : « J'en veux pas ! ». Sa mère malheureusement est rentrée dans un état pitoyable, elle est décédée deux ou trois ans après être rentrée. Son père a tenu le coup plus longtemps parce que c'est une personne qui a tellement souffert dans les camps de déportation, c'était l'horreur ! J'en connais un aussi à Trouville qui a plus de quatre-vingt dix ans et il résiste encore. Le corps est résistant. Il y en a un aussi qui a été déporté et qui habite Lisieux, M. Culeron. Un petit homme qui porte souvent aux monuments aux morts un drapeau qui a été fait dans la robe d'un très grande résistante lexovienne. Un drapeau rayé qui était le vêtement des déportés. Je le vois de moins en moins maintenant car il est très agé et plus très solide. M. Culeron n'a pas été résistant. Il a été déporté et dans les déportés, il y avait des déportés de la résistance et des déportés de rafle. À Lisieux par exemple, celle dans laquelle a été pris mon beau-père mais il l'ont relaché car il avait beaucoup d'enfants. Pour le travail, il y avait des rafles. Pour un soldat allemand qui était tué, il y avait dix civils fusillés. En priorité, les communistes et s'il n'y avait pas assez de communistes, ils prenaient les gars dans les prisons. Si c'était un officier, c'était cinquante, cinquante fusillés. Alors on avait donné l'ordre de ne jamais tuer un soldat allemand parce que faire tuer dix innocents, ça ne valait pas le coup. Il fallait mieux détruire le matériel que de tuer un soldat allemand. Sur le nombre, ça ne changeait rien. C'était de la répression. Vous savez ce qui s'est passé à Oradour-sur-Glane, à Tulle. A Tulle, quatre-vingt dix-neuf pendus, à Oradour, le pays complet ravagé par les S.S. Ils ne faisaient pas de sentiment. Le moindre incident, il y avait toujours des otages.

Questions à M. Paul Lerouge

Rencontre du 9 Janvier 2014 au lycée Paul Cornu

Classe CTIG – E. NEGRIER

  1. Comment avez-vous appris que la guerre était finie ?

Au débarquement, on a appris le jour même le débarquement, et nous avions une combine, on entendait le canon. J'étais pourtant dans l'Eure. On prenait un manche à balai, on l'enfonçait dans la terre et on se le mettait à l'oreille. On entendait les roulements. Plus ou moins fort. Et y'avait pendant toute la guerre, avec les allemands, l' avance, le recule, on connaissait par les mouvements de résistance plus ou moins. On avait des informations. Puis après c'est normal, après quand on a était libéré nous, c'était plus facile à suivre les événements. Et on a appris la fin de la guerre en Mai. Ça c'était facile

  1. Quels changements avez vous observé dès la fin de la libération ?

Alors la je vais vous dire une chose, ça était autre chose. Après la libération y'a eu beaucoup de problèmes...Beaucoup de problèmes. Premièrement il y a des personnes quin'ont jamais était résistant qui se sont fait passer pour des résistants, qui ont voulu s'élever à des postes, qui en avait pas. Ça y'a eu beaucoup de problèmes. Et y'a eu après la libération, ça flottait pendant quelques années parce qu'il a fallu attendre Mai 45, le retour de tous les prisonniers de guerre mais surtout le retour pour nous de tous les déportés. Et malheureusement il y a eu beaucoup de manque. Alors nous étions la (?) pour récupérer les survivants qui passaient par Paris et puis après qui étaient dépossés suivant les régions. Mais malheureusement au bout d'un moment il n'y avait plus personne qui rentrait, c'est la qu'on a commencé à faire le compte. Un exemple chez nous, dans le mouvement Résistance il y a eu quatre-vingt quatre personnes qui étaient arrêtées dont mon père et seulement, il y en a eu quarante qui sont jamais rentrées. Quarante qui sont morts en déportation. Mon père a eu la chance car nous sur les trois du pays, c'est un petit pays, le lieutenant colonel il a été mortellement blessé devant moi, à la mitraillette, le capitaine (nom?) est mort à Flossenbürg, le fameux camp de la pierre à Flossenbürg et mon père est le seul qui soit rentré.Vous voyez un petit peu, quatre-vingt quatre arrestations et dans ceux qui ont été arrêté malheureusement, y'en a qui sont rentrés heureusement mais malheureusement ils sont décédés quelques années après des suites de la déportation. Un exemple, j'ai eu un camarade qui lui est entré dans la résistance à (nom lieu?) à l'âge de douze ans (Jean-Jacques Oduc ?). Et bien son père a été déporté, sa mère déportée, son père a été à Buchenwald, sa mère a été à Flossenbürg, et bien sa mère a été vendue par les SS au laboratoire Bayer. Voyez vous savez c'est les marques des médicaments, Bayer, c'était un laboratoire qui faisait des tests sur les déportés. Son père a survécu longtemps mais sa mère est décédée deux ou trois ans après. Elle était massacrée. Alors vous avez des gens, j'en ai connu plusieurs qui sont décédés quelques années après parce qu'il sont rentrés dans un état tel que c'est très difficile. Et d'autres, j'en connais qui sont très bien, j'en connais un à Trouville et bien il pête la santé, c'est le moment de le dire, il a quatre-vingt dix ans. Y'en a qui sont très bien remis. Y'en avait un à Lisieux, y'avait M. (Culeron nom?) à Lisieux qui a été déporté mais pas déporté de la résistance. M. Culeron voulait passer en Afrique et par personne interposée, on lui a dit tu vas, tu vas là et il a pris un passeur à la frontière française espagnole. Ce passeur l'a vendu aux allemands car les passeurs vous avez des passeurs honnêtes et des passeurs malhonnêtes. Ils faisaient de l'argent, ils vendaient. Alors M. Culeron a été pris par les allemands, embarqué et directement au camp de Buchenwald.

  1. Avez-vous gardé des contacts avec d'autres résistants après la guerre ?

Je peux vous dire que les derniers contacts avec des résistants, ça fait deux ans que c'est arrêté. C'est avec le mouvement Résistance. Le mouvement Résistance qui édite un journal que j'ai encore des revues là, pendant la guerre. Mouvement Résistance qui a été crée par M. (Destré nom ?) de Paris, M. (noms?) et qui ont fait un journal Résistance et qui a toujours été imprimé et ça fait seulement deux ans que c'est arrêté car nous étions, à la sortie de la guerre, les rescapés, plus de trois mille seulement du mouvement Résistance et à la fin nous étions une trentaine. Alors le président (Stanler nom?) il a dit c'est plus la peine, les gens sont malades. Malheureusement le dernier rendez-vous j'ai pas pu y aller, pourquoi, parce que c'était la grève des chemins de fer et comme je ne veux plus aller à Paris en voiture. Ça fait seulement deux ans que c'est arrêté. Et nous avions ce journal là, voyez-vous qui date d’Août 1942. Vous les verrez après si vous voulez. Alors là j'ai pris seulement deux formulaires, y'en a un qui date de 2003, l'autre de 2004.

  1. Avez-vous parlé de la guerre avec vos proches peu après la guerre ou plus tard ?

Non, non... Parce que je vais vous dire une chose, avec mes parents on en parlait plus, on en parlait plus. Et mes enfants, je vais vous dire une chose, mon fils a appris bien des choses sur moi le jour d'une remise de décoration car il ne savait pas. Non pour nous c'était, on se rencontrait entre anciens résistants parce qui si vous voulez au CVR de Caen, ça veut dire Compagnon Volontaire de la Résistance, au CVR de Caen y'a tout le monde, c'est des gens de tous réseaux, y'a aussi bien de Bretagne, y'a des (AFPP?), y'a tous les réseaux, parce que les gens ont déménagés plus ou moins. Moi j'étais né à Evreux dans le temps quand je suis arrivé dans le Calvados, je suis arrivé à Lisieux en 1951. Je suis arrivé pour la reconstruction. Donc après j'ai fait partie de Caen. J'ai rencontré beaucoup de personnes comme ça. Entre résistants on parle de certains faits et on parle de personnes qu'on a connu plus ou moins mais dans la famille, non, même avec mes frères non plus. Non... Non parce que pour nous c'est passé. Et puis il s'est passé tellement de choses après guerre que ça nous avait un petit peu écœuré. Parce que je vais vous dire une chose, cinq ans après, la libération, et bien, tous les résistants ont été montrés du doigt, montrés du doigt par qui ? Par les collaborateurs qu'avaient repris le pouvoir et c'est le Général de Gaulle, quand il est revenu, qu'a dit « qu'est ce que ça veut dire ! », qu'a mis de l'ordre. Moi j'ai eu un problème une fois, parce que j'étais un ancien résistant, avec la gendarmerie, parce que le préposé c'était un ancien collaborateur. Il s'est souvenu que moi j'étais résistant, et ça y'avait des petites vengeances personnelles.... C'est pour ça qu'on en parlait pas.

  1. Pourquoi avez-vous souhaité témoigner de votre expérience ?

Bah j'ai témoigné aujourd'hui c'est parce que vous avez la gentillesse de me le demander. Autrement vous savez, je ne serais pas venu qu'est ce que vous voulez que je vous dise...

Documentaliste : Mais vous n'avez pas été sollicité par d'autres établissements scolaires ?

Si j'ai fait Jean Moulin une fois, avec le sous préfet et le général (nom?). Bon malheureusement M. (nom?) qui était là aussi, a passé tellement de temps à faire un exposé sur le général Leclerc qu' il a mangé un peu de notre temps. J'ai fait des exposés mais qui auraient pu être beaucoup plus long (?) M. Leclerc je le connais très bien mais ça c'est autre chose ça. Si vous m'invitez, je vais venir. Je vais tâcher de me remémorer... Chez moi j'ai une armoire comme ça d'écrits. J'ai fait beaucoup d'articles dans les journaux, j'ai même écrit un article, y'a très longtemps dans le journal national des croix de guerre. Comment je suis rentré dans la résistance, car j'avais rencontré, à l'étranger, un monsieur, on visitait, je vais vous dire une chose c'était en Jordanie et ce monsieur qui s'appelait M. (nom?), malheureusement je pense qu'il est maintenant décédé. On parle comme ça puis je fais une réflexion sur les décorations et puis M. (nom?) comme ça... Parce que c'était une nouvelle royauté, y'avait beaucoup de décorations, je dis quand même, tant de décorations pour une nouvelle royauté, ça me paraissait drôle. Alors il me fait tout un exposé et puis me dit je suis le trésorier national des croix de guerre. « Ah bon, enchanté et bien je vais vous dire moi aussi je fais partie des croix de guerre et puis en plus je suis l'une des plus jeunes croix de guerre de France ». Et je suis la plus jeune croix de guerre de Normandie. Le plus jeune décoré de Normandie. Alors il m'a dit il faut que vous me fassiez un article. J'ai fait un article il y a de nombreuses années sur les croix de guerre et comment j'étais entré dans la résistance. Et depuis j'ai fait tout un livre, et une chose j'ai voulu quand même que toutes les personnes, qui femmes comme hommes qui ont fait partie de la résistance du canton de Rosmenil, si vous voulez, que leurs noms... et j'ai fait un livre dans lequel tout ce qu'ils ont fait. Et voyez la parité on l'avait déjà nous, parce qu'il y avait autant de femmes que d'hommes. Dans la résistance, à part les maquis, c'était des hommes c'est sûr... mais hors les maquis il y avait autant de femmes que d'hommes. Vous en avez une qui habite à Notre Dame de Courson. Une jeune femme, enfin elle est plus jeune, qui était à Combat près de Lyon. Elle était à Combat. Elle a maintenant près de quatre-vingt dix ans, qui est médaillée de la résistance. Y'avait beaucoup de femmes, malheureusement avec l'âge on est les survivants. Moi à Lisieux j'en connais pas d'autres, peut-être qu'il y en a d'autres je sais pas.

  1. Pensez-vous que votre vie aurait été la même si il n'y avait pas eu la seconde guerre mondiale ?

Bah ça c'est difficile, vous savez, la vie d'une personne (?) Bon moi j'ai eu la chance, j'avais de très bons parents, très très bons parents, et je suis entré dans l'entreprise de mon frère et parce que je vais vous dire une chose, c'est pas le métier que je voulais faire, la guerre m'a empêché de faire mon métier. Je voulais être pharmacien moi. Et mon père, quand les allemands, mettons, en juillet/Aout 40, et bien mon père m'a dit : « Tu ne pourras pas continuer tes études. » J'ai dit « Pourquoi ? » « Et bien parce que je n'ai plus de personnel ». Du personnel de mon père était rentré qu'une seule personne, (Jean Joly?), il avait arrivé à passer entre les jambes des allemands parce que il mesurait un mètre cinquante, oui un mètre cinquante, fort comme un Turc mais un mètre cinquante de haut. Et on avait eu la chance, on a vu arriver, récupérer des réfractaires qui quand même connaissaient le métier. Parce que vous pouvez pas prendre un cultivateur (?) et comme ça pendant la guerre mon père a pu continuer son entreprise. Et c'est comme ça je suis rentré à l'entreprise de mon père, très jeune, beaucoup plus jeune … parce que vous savez, il y a longtemps, on commençait de bonne heure, on marchait à pied ou avec beaucoup de chance on allait à vélo. C'est ça, la voiture, tout ça, ça n'existait pas. Dans le pays, cinq cent habitants, y'avait trois voitures : le docteur qui utilisait des bons d'essence, les deux autres personnes qui avaient cinq litres d'essence par mois alors cinq litres (?) puis c'est tout, tout le monde allait à pied ou en vélo, en vélo, celui qui avait de quoi avoir des pneus.

  1. Regrettez-vous certaines de vos actions pendant la guerre ?

Ah je ne regrette rien ! Non, non,non, ce qui est fait est fait. Je ne regrette pas les actions que j'ai fait pendant la guerre. J'ai aidé, j'ai fait des travaux pour la France, c'est tout. Non je ne regrette rien du tout. J'ai peut-être fait des choses que je n'aurais pas dû faire c'est possible mais vous savez quand on a treize, quatorze ans c'est déjà pas mal de faire ça... C'est déjà pas mal. J'ai eu plus d'une fois fort peur je peux vous le dire, mais j'avais peur mais en moi il y avait quelque chose qui revenait, j'étais fier. La fierté prenait le dessus de la peur, et je fonçais et on m'avait tellement mis en garde, on m'avait, on peut dire éduqué, comment s'y prendre, ceci cela, comment réagir. Par le capitaine (Trumet nom?) qu'était quand même un capitaine de formation. Beaucoup de jeunes se sont fait tuer bêtement, il y a eu beaucoup de réfractaires parce qu'ils n'avaient pas de formation. Vous savez comme un ouvrier, si vous n'avez pas appris à poser une tuile ou si vous n'avez pas appris à serrer un boulon et bien il ne saura pas. Nous avions une formation, donc nous avions la méfiance, on faisait très attention, on nous disait toujours : « Tu écoutes, tu regardes et tu la fermes ! » C'était la devise.

  1. Pensez-vous que les jeunes, à l'heure actuelle, se préocupent assez de l'Histoire de leur pays ?

Non, non... Parce que les jeunes ils sont un peu désintéréssés dans l'ensemble, il y en a quelque uns je dis pas, il y en a quelque uns... puis c'est l'évolution de la vie. Nous on pouvait s'occuper de beaucoup plus de choses parce que on avait rien, donc le peu qu'on avait ça nous occupait. Tandis que vous actuellement vous avez tout, tout vous fleurit. Vous pouvez vous distraire, vous pouvez voir n'importe quoi, vous pouvez véhiculer, vous pouvez tout faire, vous avez tout. Vous rentrez dans la vie, vous avez tout. Nous on avait rien. Vous savez on avait un poste de radio et encore on aurait pas dû l'avoir, on le cachait... Pour écouter Radio Londres, La France parle aux français. On faisait le guet à la porte car pendant la guerre toutes les fenêtres vous deviez fermer les volets et tous les volets devaient avoir du n'importe quoi, du papier goudron avec des punaises ou des clous, on devait pas voir une seule lumière, autrement si la police allemande passait vous aviez une amende, ça pouvait même aller au dessus. On en a eu une, une fois par ma faute qui avait oublié de fermer les volets. Vous n'aviez pas le droit d'avoir de lumière à vos vélos. Vous savez comment étaient les vélos ? Vous aviez un phare, mettons comme ça, et bien vous deviez peindre le mi-car en noir et vous aviez une fente de cinq centimètres de long sur un centimètre de haut sur le phare afin que l'on puisse voir cette petite lumière si on se croisait ou la police allemande pouvait voir, vous deviez avoir un feu rouge mais pas de lumière c'était strictement interdit. Alors quand il faisait noir je vais vous dire une chose, vous n'y voyiez pas grand chose.

Question élève : Pourquoi fallait-il masquer les lumières ?

Pour l'aviation. Pour l'aviation alliée. Pour qu'il soit pas reconnu, pour que vous ne soyez pas repérer. A partir de telle heure, vous deviez tout éteindre. Y'avait le couvre-feu, il était à dix heure. A partir de dix heure, y'avait plus personne dans la rue, c'était strictement interdit. Si vous étiez pris, vous étiez emmener à la kommandantur et vous risquiez la prison, vous risquiez tout un tas de choses. Ah non ça la lumière c'était très strict. Un volet , ça m'est arrivé une fois par ma faute, j'avais oublié de fermer et par l'arrière cuisine, par une petite rue, par derrière, ils ont aperçu et bien ils sont arrivés . Alors les allemands c'est tout simple, c'était la gendarmerie de Bernay à la Kommandantur et ils étaient toujours deux ou trois et accompagnés d'un alsacien qui parlait français soit des malgré-nous, soit... enfin un alsacien quoi. Et nous avions oublié de fermer nos volets. Ça fait trois francs d'amende. Chaque fois. D'abord on véhiculait en vélo, nous avions toujours trois pièces d'anciens francs, qu'est l'équivalent du franc CFA maintenant si vous voulez, dans notre poche parce que la moindre bêtise que nous pouvions faire et nous étions vus par les allemands on avait une amende : trois francs. Alors si vous donniez pas les trois francs, ils gardaient le vélo. Alors si vous étiez loin vous aviez plutôt intérêt à donner les trois francs. Parce que vous n'aviez pas le droit de rouler côte à côte en vélo, c'était strictement interdit. Vous deviez rouler toujours en file indienne , tout le temps et même parfois à une certaine distance.

Question élève : Pourquoi ?

Pour ne pas parler ensemble. Nous n'avions pas le droit, vous savez que les jeunes on est toujours fringant sur un vélo, on lâche le guidon, ça m'est arrivé ça, c'était strictement interdit. Vous savez si vous étiez vu par un allemand, il vous prenait le vélo, il dévissait le guidon, il enlevait le guidon et il vous disait « puisque vous n'avez pas besoin du guidon, voilà le vélo, vous repartez comme ça. » Dîtes vous une chose, avec un guidon, le vélo c'est très facile, c'est le vélo qui vous porte. Mais quand vous n'aviez plus de guidon, c'est vous qui portiez le vélo. C'était très très strict. Moi j'ai payé trois francs une fois, sur la route de Serquigny à Beaumont Le Roger parce que je me trouvais avec un ouvrier de mon père qui avait un chantier par là, et machinalement, on devait avoir quelqu chose à se dire, je me suis approché, au bout là-bas, y'avait la Volswagen qu'arrivait. J'ai dit « ça y'est on est bon, trois francs ! » Mais ça le coup du vélo, vous savez...On était toujours sur nos gardes, d'abord à un point, que j'avais arrivé à trouver un rétroviseur que j'avais mis sur mon vélo, j'étais toujours en train de regarder devant mais j'étais souvent en train de regarder le rétro si j'apercevais pas une voiture allemande qui arrivait. On était toujours, toujours sur nos gardes. Tout le temps. Vous aviez dans l'armée allemande des soldats qui étaient sympathiques. Vous aviez des pères de famille qu'auraient préféré être chez eux que d'être en campement en France et puis à côté de ça vous aviez vraiment des salopards, surtout les SS. Deux fois j'en ai (?) des SS. Heureusement, j'avais des bonnes jambes, j'ai pu arriver à me sauver. Et je vais vous raconter une chose : j'ai manqué être tué par un V1. Les V1, vous savez, les premières bombes volantes allemandes. Figurez vous qu'il y avait des rampes de lancement qui étaient dans l'Eure mais du côté de (Bacomon?), les carrières de (Bacomon). C'était téléguidé mais il arrivait que certains soient déréglés soit par sabotage ou soit parce que c'était déréglé et j'étais avec ce fameux (Joly?), j'allai sur la Barre-en-Ouche et tout à coup je dis à Joly : « Ecoute on dirait un V1 », parce que on savait reconnaître un avion d'un V1. Parce que un avion (il mime le bruit), c'est un ronflement. Tandis qu'un V1 c'est (il mime le bruit), tout le temps comme ça. Alors je dis à Joly : « C'est un V1 ça ! », alors il me dit « oui ». (?) quelques secondes après, une déflagration terrible, il a explosé à un kilomètre de nous. Nous étions sur la droite, tous les deux on s'est retrouvé projeté dans les fossés gauches. On était plus sur le vélo . « Qu'est ce qui se passe ? », il me dit. Et je lui dis : « Et bien elle a éclaté. » Et bien, curieux comme nous étions, nous sommes allés voir. Nous avons trouvé l'emplacement car les V1 étaient une bombe soufflante, c'était fait pour bombarder Londres, les V1. Après il y a eu les V2. Et cette bombe soufflante, le trou n'était pas tellement profond. Ça vous faisez un trou de un mètre, des fois un peu plus, mais trente mètres de diamètre ! Il ne restait plus un pommier dans l'herbage, plus un poteau de clôture, plus rien ! Et y'a un cultivateur qui se trouvait à une certaine distance, il a reçu des projections dans sa maison. Alors on était curieux, et bien nous n'avons rien trouvé du V1 ! Même pas un morceau de ferraille ! Rien ! On aurait pu recevoir des éclats. Mais j'aime mieux vous dire que ça fait drôle. Carrement soufflé ! C'est le V1 qu 'avait éclaté. J'avais fait comme réflexion avant (?)

Classe C1ATMFC- S. TREHET

Áquel âge êtes-vous entré dans la résistance ?

Alors, je suis entré en résistance à 12 ans et 10 mois.Je vous expliquerez plus tard comment je suis entré en résistance.

Étiez-vous scolarisé à l'époque ?

Indirectement je finissisais … moi je devais être pharmacien et la guerre m'a empêché de faire médecine mais j'étais bon à l'école et j'ai eu mon certificat d'études à 11 ans et demi et donc je voulais continuer et voulais être pharmacien mais mon père m'a dit non.

Où viviez-vous à l'époque, où habitiez-vous ?

J'habitais dans l'Eure, pratiquement à côté, à Beaumesnil, à 13 km de Bernay. Mes parents habitaient ici et j'habitais chez mes parents.

Que faisaient vos parents ?

Mon pére tenait une petite entreprise de charpente et de couverture à Beaumesnil

Et votre maman ?

Ma mère était femme au foyer, nous étions quatre enfants alors il y avait de quoi s'occuper !!!

Pourquoi et comment êtes-vous entré dans la Résistance ?

Ah comment ?!!! Alors là c'est une question ! … Le capitaine Georges Trumelet qui était un capitaine d'active, qui a fait toute la guerre 1914/18 dans l'artillerie coloniale et … venait de créer avec mon père … et sont entrés au mouvement FTP dans la Résitance. Et il y avait dans le réseau deux femmes …....... la receveuse des postes mademoiselle CAPET et une jeune femme en retraite mademoiselle MICHAUD.

Mademoiselle Capet recevait les messages par télégrammes car déjà on se méfiait des écoutes téléphoniques. Car les Allemands écoutaient les écoutes téléphoniques, ils n'étaient pas plus bêtes que les autres. Alors pour éviter ça, c'était par télégramme. Et il y avait le porteur de télégramme et quand il allait porter un ou deux messages, le capitaine …....... a dit à mon père, mon père était son lieutenant, « cela ne peut pas aller, faut qu'on trouve quelquechose d'autre. Mais ton fils, Paul, il ne pourrait pas me porter des télégrammes. »

Et c'est comme cela que je suis devenu porteur de télégramme si vous voulez. Et le capitaine TRUMELET m'a donné un nom : le Petit Pierre, de façon qu'on ne sache jamais que Paul … parce que dans un pays de 500 habitants on connait presque tout le monde par les prénoms … c'est pas Lisieux quoi et pour éviter qu'on me reconnaisse et bien on m'a appelé Petit Pierre et on m'a toujours appelé le Petit Pierre. C'est comme cela que je suis entré, je suis devenu porteur de télégrammes, de missives et autres jusqu'à une certaine époque aprés.

Comment a réagi votre famille ?

Ma famille a très bien réagi parce que ma famille était très française, anti-allemande on peut dire. Donc pour eux c'était presque un honneur. Mais ma mère me disait toujours : « attention, attention, il y a la méfiance, fais-ci, fais-ça, réponds pas ci », parcequ'elle me disait toujours « tu écoutes, tu écoutes, tu écoutes tout le monde, tu écoutes, tu regardes mais tu la fermes ! »

Aviez-vous des membres de votre famille qui combattaient avec vous ?

Non nous n'en avons pas eus.

Aviez-vous une amoureuse à l'époque ?

Vous savez à 12 ans et demie !

J'vais vous dire une chose, on se taisait, on ne parle même pas à son voisin de ça parcequ'on se méfiait, on avait confiance en certaines personnes et on se méfiait des autres. Et à peine une parole de travers et c'était la catastrophe, c'était les arrestationsvous savez. Il suffit qu'une personne parle. Et nous on en a connu un, il a parlé, il a livré 84 personnes … 40 ne sont jamais revenues des camps de concentration. Alors vous voyez un petit peu les dégâts. Alors là, là, il y avait de la méfiance.

Que faisiez-vous au début de la guerre ?

Au début de la guerre nous avons fait comme tout le monde, on a accepté les Allemands comme ils étaient. Et moi j'étais enfant, je suivais mes parents.

Au début c'était très dur, les gens étaient un petit peu désorganisés au début de la guerre et puis personne ne s 'attendait à l'occupation de l'armée allemande. On était un peu ...vraiment désorienté. Cela a duré pendant un an comme cela.

Où avez-vous combattu ?

Moi je n'ai jamais combattu, combattu sur un front. La Résistance ce n'était pas cela, à part les maquis. Vous aviez des maquis à Saint Etienne la Tillaye.

Mais la Résistance c'était sauver les gens, les aviateurs, les maquisards (et tout cela …) ; et de détruire le matériel allemand. Mais combattu … il fallait éviter de combattre. Parce que je vais vous expliquer : un Allemand tué c'était 10 Français de tuer. Un officier Allemand tué, c 'était 50 Français fusillés. Alors cela faisait ralentir, cela donnait quoi de tuer un soldat allemand ? Fallait mieux détruire un wagon de munitions que de tuer un soldat allemand vous savez.

Où vous cachiez-vous ?

Mais je ne me cachais pas … Etant enfant, les Allemands ne se méfiaient pas et bien justement il y a eu des enfants dans la Résistance qui ont fait des choses formidables. Et on faisait faire les choses souvent les plus difficiles à faire par les enfants parceque les Allemands ne s'en méfiaient pas.

On passait à la barbe des Allemands. On avait peur d'une seule chose, ….... de recevoir un coup de pied dans les fesses ou un coup de trique, c'était tout !

Mais dans l'ensemble, beaucoup de faits d'armes ont été faits par les enfants.

Etiez-vous courageux ?

Ah oui ! J'ai toujours été courageux, tout le temps en tout !

J'ai été courageux parce que j'ai eu bien souvent la peur aux fesses mais l'orgueil prenait le dessus. Donc le courage m'aidait à faire ce que j'avais à faire.

Aviez-vous peur de mourir ?

Pas spécialement … non … je n'y pensais même pas. Quand on est adolescent on ne pense pas à cela.

Quel fut votre pire souvenir ?

C'était l'arrestation de mon père.

Vous savez quand vous avez une dizaine d'Allemands aves la mitraillette au poing et qui tirent. Et qu'on arrête votre père et qu'on m'arrête en même temps. Mais comme j'étais une gamain, on m'a laissé sur place. J'ai eu de la chance. Et vous savez une chose et c'est pour moi un grand souvenir car j'ai sauvé ce jour-là, indirectement, beaucoup de vies. Car chez mes parents, le lieutenant colonel qui a été mortellement blessé devant moi à coups de mitraillette, venait d'apporter à mon père les plans de toutes les rampes de lancement des V1. Vous voyez ce que cela veut dire.

Et nous avions tout cela et je savais que ce plan là c'était la peine de mort. Et par acte de passe-passe je suis arrivé à soustraire à la police allemande ce plan et remettre (comme mon père avait une petite entreprise de charpente et de couverture) à la place un plan d'une maison qui avait sensiblement la même grosseur. Et la police allemande n'a rien vu. Car en quelques secondes je suis arrivé à cacher ce plan dans une petite cheminée d'angle, dans le conduit de la cheminée, il y a un coude. Et en passant le rouleau, je l'ai coincé et je l 'ai caché.

L'Allemand qui me gardait à la mitraillette était tellement content et avait été félicité l'autre (Allemand) qui avait abattu mon colonel … Pendant ce temps là, j'y sui arrivé.

C'est mon meilleur souvenir.

Vous pensez toujours, souvent, à cette période ?

J'y pense de temps en temps c'est vrai . Alors je vais vous dire une chose … on pense souvent à ça, on pense aux gens, on pense aux faits d'armes plus ou moins, ça nous revient tout le temps. Je ne connais pas tellement de résistants qui ne pensent pas aux gens qui sont morts, et nous on a perdu beaucoup de monde, et on revoit ces gens tout le temps, tout le temps.

Avez-vous risqué votre vie ?

Ah oui plus d'une fois. Vous savez quand on vous envoie transporter des postes émetteurs ou des armes et que vous savez que l'armée allemande vous surveille, c'est risquer sa vie.

Avez-vous déjà pleuré avant, pendant ou aprés un combat ?

Non … on aurait plus les larmes aux yeux aprés … c'est plus maintenant que pendant la guerre … quand on est jeune c'est pas pareil.

Étiez-vous fort dans votre tête ?

Oui parceque j'avais été formé, quand vous êtes formé par une personne de qualité cela vous permet d'engendrer beaucoup de choses et de savoir « tu dois faire ci, tu dois faire ça » et de réagir. C'est comme un ouvrier qualifié, si il est vraiment qualifié il sait faire quelquechose.

Retourneriez-vous à la guerre ?

Vous savez à mon âge ils ne voudraient pas de moi.

Oui mais on ne se méfierait pas de vous non plus ?

Alors-là c'est difficile de vous répondre, parce que quand on analyse bien ce qui se passe aprés-guerre, on se demande bien pourquoi on a fait la guerre.

Quelle a été votre plus grande peur ?

C'est au moment de l'arrestation, pour moi … je ne savais pas ce qu'allait devenir ma famille, mon pére est embarqué, et si on embarquait ma mère on se retrouve nous quatre enfants seuls. J'étais le deuxième, c'est ma sœur qui était l'aînée et malgré toutes les responsabilités que j'avais … parceque dites-vous une chose c'est quand mon père a été arrété, il y avait un centre de réfractaires à s'occuper. Et qui s'occupaient des réfractaires, de les approvisionner ? c'étaient ma mère et moi parcequ' il y en avait qui n'étaient pas très chauds pour venir à Beaumesnil . Le mouvement Résistance avait nommé certaines personnes mais elles ne sont pas venues parceque pendant un mois nous avons été surveillés par la milice de Pétain et je peux vous dire qu'il y a des nuits où je n'ai pas dormi parceque les voitures elles passaient et comme il n'y avait pas trop de voitures à l'époque, il n'y en avait presque pas. Il n'y avait que la milice ou les Allemands qui en avaient.

Quelles armes aviez-vous ?

Alors les armes … c'était une mitraillette, les Sten ou les révolvers. A la Libération on a eu les fusils mitrailleurs mais moi je ne les ai pas trop eus.

A 12 ans vous teniez une arme ?

A 12 ans moi j'avais des armes, moi même j'avais un pistolet un 7.35 à barillet. Je ne sais pas ce qu'il est devenu. A la Libération on a tout donné.

Quel était le plus grand danger pour vous à l'époque?

Alors le plus grand danger c'était un petit peu la peur des réfractaires. Car les réfractaires on ne savait pas à qui on avait affaire. Vous pouviez avoir des gens bavards et par leurs bavardages ils pouvaient détruire un réseau.

Qu'est-ce qu'un réfractaire ?

Un réfractaire c'est une personne qui ne veut pas aller travailler pour l'armée allemande, un réfractaire c'était des jeunes gens qui étaient réquisitionnés à partir de 18 ans pour aller travailler dés le début en 1941 sur le Mur de l'Atlantique, vous savez les blockhaus que vous voyez. Et c'était l'entreprise Todt, allemande donc, qui avait une base à Beaumont le Roger . Aprés, ils étaient réquisitionnés pour aller travailler en Allemagne, alors certains ne voulaient pas aller en Allemagne. Alors ils arrivaient à contacter des réseaux de résistance plus ou moins pour qu'on les cache. Alors vous pouviez avoir un réfractaire qui était de l'autre moitié de la France qui était caché à Beaumesnil ou autre, alors c'est comme cela que nous en avons caché plus de 1100 sur 50 km à l'arronde. Il y avait premièrement les fermes, les artisans et puis d'autres personnes comme ça parce que à la fin les fermiers …. On avait des problèmes parce que les réfractaires n'étaient pas payés, les cultivateurs les nourrissaient et les blanchissaient, c'est tout, mais ils ne les payaient pas. Ils travaillaient comme cela quoi et pendant la guerre tout était avec une carte, avec une carte de tabac on n'achetait pas un paquet de tabac comme cela, une carte de vin pour les travailleurs de force (avec des timbres). Une personne qui était considérée comme travailleur de force, qui avait un métier dur, avait la possibilité d'avoir un peu plus de suppléménts et lui avait droit au vin. Mais le vin il n'y en avait presque pas.

Mais le pire c'était surtout le tabac . Mais nous avions une chance inouïe, c'est que dans notre réseau nous avions une famille belge de Thevrai, la famille Bosschaert. Ces Belges plantaient du tournesol car vous savez que ... vous voyez des champs de maïs partout mais cela n'existait pas pendant le guerre les champs de maïs, c'est apparu aprés guerre. Pendant la guerre et même bien avant on plantait des betteraves fourragères et les moissonneuses batteuses n'existaient pas, on battait le grain et du grain on avait la demi paille, c'était l'écorce du blé. Les cultivateurs gardaient cette demi paille, la mélangeaient avec la betterave et donnaient ça aux bestiaux. Et le tournesol c'était pour l'huile. Ce Belge plantait tous les ans un grand champ de tournesol et dans le milieu il plantait du tabac, il plantait du tabac de Virginie car le tabac de Virginie est un tabac bas et à grandes feuilles donc il produisait beaucoup. Et les Allemands même en voiture ne pouvaient pas le voir. Et le tabac se récolte bien avant le tournesol et je peux vous dire que si j'allais dans cette ferme dont je m'occupais et que je vérifiais tous les chevrons par en dessous les toitures il y a des milliers de clous où toutes les feuilles de tabac étaient accrochées. Ce Belge avait une chance, il avait une machine à main à couper le tabac et c'est madame Bosschaert qui tournait la manivelle et monsieur Bosschaert qui enfilait les feuilles. Et c'est moi dans du papier journal, car il n'y avait pas de papier et tout était réccupéré, 1 cm de tissu c'était réccupéré, qui « semait » les paquets de tabac.

Quelle(s) conséquence(s) tout cela a-t-il eu sur votre vie ?

C'est une question difficile à vous répondre... cela m'a formé mon caractère car on était adulte avant l'âge. Et j'ai toujours eu l'esprit de commandement, j'ai toujours été commandant. J'ai eu une entreprise à Lisieux qui a été un des fleurons des entreprises lexoviennes … cela m'a formé le caractère, je fais attention … J'ai été un petit peu déformé par la résistance, de toujours regarder, de toujours voir si il n'y a pas quelqu'un qui m'épiait tout le temps.

Avez-vous regretté de vous êtes engagé dans cette guerre ?

Ah non pas du tout. Ce sont mes parents qui m'ont embarqué là-dedans avec le capitaine Georges Trumelet et puis aprés c 'était un enchaînement. Et puis aprés c 'était une fierté.

On va dresser votre portrait chinois pour dégager votre personnalité.

Si vous étiez un animal ?

Peut-être un renard.

Si vous étiez un film ?

Peut-être le jour le plus long.

Si vous étiez un pays ?

D'abord la France, la France c'est un très beau pays et puis il y a tellement de souvenirs … la France.

Si vous étiez un chanteur ou une chanson ?

Je ne sais pas très bien chanter et si j'étais une chanson je serais les chants de la Résistance, Le chant des Partisans.

Si vous étiez un plat ?

Je ne sais pas comment vous répondre.

Si vous étiez une couleur ?

Déjà je m'appelle Lerouge, je ne changerais pas de nom.

Si vous étiez un objet ?

Une scie pour passer partout.

Si vous étiez un sentiment ?

J'en ai pas mal. J'adorais ma famille .

Si vous étiez une personne connue ?

Je ne sais pas ce que cela pourrait donner.

Si vous étiez un livre ?

Je m'appellerais Résistance. Il existe un très joli livre Résistance mais malheureusement je n'ai jamais pû retrouver le chapitre 1. C'est magnifique.

Si vous étiez un sport ?

J'ai fait du sport pendant la guerre car pendant la guerre nous n'avions que cela à faire. J'étais coureur à pied et je faisais beaucoup d'athlétisme, j'étais un mauvais footballeur. Mais j'ai été deux année de suite champion de Normandie du 100 m et du 400 m et je courrais très vite car je faisais mon 100 m en 10 secondes, sans chaussures. Je courrais sur l'herbe ou sur le sable sans chaussures car pendant la guerre on ne trouvait pas de chaussures. On courrait nu-pieds.

Si vous étiez un acteur ?

Dans le temps j'aimais beaucoup Jean Marais.

Si vous étiez un monument ?

Je ne voudrais pas être le monument aux morts, je voudrais plutôt être un monument en l'honneur de quelqu'un qui a fait quelquechose, qui a inventé quelquechose, un monument de la Résistance. La stèle dans le jardin publique à côté du Monument aux morts j'en suis le président, c'est moi le président d'honneur de la stèle.

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